dimanche 30 juin 2013

Egypte : entre guerre civile et coup d’Etat militaire


Deux ans après le départ du président Moubarak, un an après l’élection présidentielle qui vit la victoire de l’islamiste Mohamed Morsi élu le 24 juin 2012 avec 51,7% des voix, l’Egypte est plus que jamais au bord du chaos et de la guerre civile.
La partie se  joue entre quatre forces

- La première, celle qui a provoqué le départ du président Moubarak est composée de citadins, de gens qui mangent à leur faim, de « privilégiés », de « bourgeois » occidentalisés pouvant s’offrir le luxe de revendiquer la démocratie.

- La seconde est celle des islamistes, dont les Frères musulmans. Pourchassée depuis des décennies cette force est sortie de la clandestinité en s’abritant derrière les « idiots utiles » du premier groupe pour se réintroduire peu à peu sur l’échiquier politique sur lequel elle a fini par s’imposer.

- La troisième force est celle qui vit dans les banlieues défavorisées et dans les misérables villages de la vallée du Nil. C’est celle des fellahs besogneux, de ce petit peuple « nassérien » au patriotisme à fleur de peau qui exècre à la fois la bourgeoisie cosmopolite lorgnant du côté de Washington et les barbus qui voudraient ramener l’Egypte au X° siècle. Jusqu’à aujourd’hui, cette force n’a pas bougé.

- La quatrième force est l’armée dont l’encadrement est coupé en trois : un état-major composé de vieillards soldés par Washington, une fraction islamiste difficile à cerner numériquement et une majorité composée d’officiers et de sous-officiers nationalistes ayant pour modèle le colonel Nasser.

Au moment où ces lignes sont écrites, l’armée est en embuscade, tirant profit de l’échec politique et économique des Frères musulmans et de l’anarchie qui embrase le pays. La question qui se pose est de savoir quand, et sous quelle forme, elle recueillera le pouvoir.
Explications. 

Pour recevoir par courriel la suite de cette analyse, vous devez être abonné à l’Afrique Réelle.

dimanche 23 juin 2013

Il n’y a pas un « Islam de France » mais des Islam en France


Fondé pour donner aux musulmans de France une représentation officielle dégagée des influences étrangères, le CFCM (Conseil français du culte musulman) s’est désintégré à la veille de l’élection de son président. Dix ans après sa création par Nicolas Sarkozy, alors ministre de l’Intérieur chargé des Cultes, le CFCM qui est plus déchiré que jamais, apparaît comme une juxtaposition de groupes de pression aux ordres des pays d’origine de leurs membres.

Cet échec illustre d’une manière criante une réalité obstinément niée par les hommes politiques français, à savoir que l’ « Islam de France » est un mythe. Les composantes musulmanes sont en effet à ce point diverses, les financements et les rattachements à des pays étrangers (Maroc, Algérie, monarchies du Golfe, Turquie etc.,) à ce point prégnants, qu’il convient en revanche de parler des Islam en France puisque les obédiences se font plus en fonction des pays d’origine des croyants que de la religion. Explication.

Pour recevoir par courriel la suite de cette analyse, vous devez être abonné à l’Afrique Réelle.

samedi 8 juin 2013

L'Afrique Réelle N°42 - Juin 2013


























SOMMAIRE :

Dossier : Côte d’Ivoire, tous les problèmes demeurent

- Une situation politique complexe
- Les forces du désordre
 
Dossier : Le Sahelistan du Nigeria

- Une situation explosive amplifiée par l’inversion des rapports de force Nord-Sud
- La question du saillant de Jos
- Boko Haram et la tentative de création d'un Etat théocratique
- Radicalisation islamique et charia

 Editorial de Bernard Lugan :

Au Mali, durant une vingtaine de jours de combats dans la région des Iforas, dont presque une semaine d’accrochages continus, les forces françaises se sont heurtées à la farouche résistance de petits groupes de combattants organisés en deux lignes de défense, sans possibilité de recul, et qui laissèrent plus de 150 des leurs sur le terrain.
Cette manœuvre de retardement permit à l’essentiel des combattants islamistes qui occupaient le nord du Mali de se réfugier en Libye. Là se trouve aujourd’hui leur base d’action d’où ils peuvent, à tout moment, lancer des opérations dans l’ensemble de la zone sahélienne.

Le président nigérien Mahamadou Issoufou fut le premier à rompre le mur du silence, déclarant que les auteurs de l’attentat meurtrier du 23 mai qui a frappé son pays venaient de Libye. Toutes les forces de déstabilisation se sont en effet regroupées dans le sud de ce pays où elles disposent d’un véritable sanctuaire puisque l’Etat libyen n’existe plus.

Comme je le disais dans un précédent communiqué, ceux qui ont lancé la France dans la guerre civile libyenne portent toute la responsabilité de la situation actuelle.
Celle du président Sarkozy est double car, après avoir renversé le colonel Kadhafi, il est demeuré passif quand, au mois de janvier 2012, au Mali, il était impératif de fixer et de traiter l’abcès islamiste afin d’éviter sa dissémination. Au lieu de cela, dans la plus totale indécision doublée d’un manque absolu de vision géostratégique, la France a camouflé sa démission derrière l’argument d’une « action » militaire de la CEDEAO.

Avec une grande continuité dans l’incompétence, le président Hollande laissa ensuite les islamistes liquider militairement les Touareg tout en affirmant que la France n’interviendrait en aucun cas, ce qui fut un encouragement donné aux jihadistes. Cependant, et heureusement, à la différence de son prédécesseur, François Hollande a fini par écouter les militaires et a ordonné l’opération Serval. Mais cette nécessaire intervention était trop tardive car la dissémination terroriste s’était produite.

Aujourd’hui, le Niger, le Tchad et le Cameroun sont menacés, mais c’est au Nigeria que la situation est la plus explosive. Dans cet Etat mastodonte et fragmenté où les antagonismes nord-sud peuvent à n’importe quel moment déboucher sur un conflit de grande envergure, les islamistes disposent en effet d’un terreau favorable ; à telle enseigne que c’est une véritable guerre que l’armée fédérale mène actuellement contre les fondamentalistes de Boko Haram qui contrôlent une partie du nord du pays.